Le spectacle
Il est neuf heures‚ c’est dans la banlieue de Londres que cela se passe. Des gens attendent d’autres gens. Ils ont mangé de la soupe‚ du poisson‚ des pommes de terre au lard et de la salade anglaise‚ ce qui‚ on en convient‚ est assez logique dans la banlieue de Londres. On se retrouve.
Une reprise
A l’automne 2006, nous avons tenu l’incroyable pari de reprendre La Cantatrice chauve dans la mise en scène de Jean-Luc
Lagarce.
C’est la mémoire du plateau qui a permis à toute la troupe de
ces années 1991-1992, acteurs et techniciens, réunis à nouveau, de
retrouver fidèlement l’esprit et la forme du spectacle créé par Jean-
Luc Lagarce en 1991.
C’est donc avec un immense plaisir que nous nous proposons
de reprendre à nouveau, pour d’ultimes représentations, ce spectacle
en tournée à l’automne 2009, clôturant cette aventure par un salut
(un sourire) adressé aussi au génie de Ionesco, dont cette année 2009
sera le centenaire de la naissance.
François Berreur, mai 2008
Eugène Ionesco
Eugène Ionesco dont le père était roumain et la mère française est né en Roumanie en 1912. Il fut élevé en France où il demeura jusqu’à l’âge de treize ans‚ à Paris d’abord avec sa mère‚ puis à la Chapelle-Anthenaise dans la Mayenne‚ où il suivit les cours de l’école communale. En Roumanie‚ Eugène Ionesco acheva ses études secondaires‚ fit ses études supérieures et devint professeur de français.
En 1938‚ Eugène Ionesco qui ne supporte plus le climat créé par la montée du fascisme en Roumanie quitte Bucarest avec sa jeune femme et tous deux s’installent peu après en France. Pendant la Seconde Guerre mondiale et dans les années qui la suivirent‚ il exerça divers métiers‚ dans le Midi‚ puis à Paris.
En 1950‚ La Cantatrice chauve‚ sa première pièce‚ est créée au Théâtre des Noctambules dans une mise en scène de Nicolas Bataille‚ et rencontre l’incompréhension ou suscite la colère de la plupart
des critiques.
Reprise quelques années plus tard à la Huchette‚ La Cantatrice chauve y est toujours à l’affiche après presque trente années de représentations.
Dans ma première pièce : "La Cantatrice chauve"‚ qui tentait d’être, au
départ‚ une parodie du théâtre et‚ par là‚ une parodie d’un certain
comportement humain‚ c’est en m’enfonçant dans le banal, en poussant à fond‚ jusque dans leurs dernières limites‚ les clichés les plus éculés du
langage de tous les jours que j’ai essayé d’atteindre à l’expression de
l’étrange où me semble baigner toute l’existence.
Eugène Ionesco
Notes et contre-notes
Jean-Luc Lagarce
Jean-Luc Lagarce est né le 14 février 1957 à Héricourt (Haute-Saône) ; il passe son enfance à Valentigney (Doubs) où ses parents sont ouvriers aux usines Peugeot-cycles.
En 1975, pour suivre des études de philosophie, il vient à Besançon où parallèlement il est élève au Conservatoire de Région d’Art dramatique. Il fonde en 1977 avec d’autres élèves une compagnie
théâtrale amateur le "Théâtre de la Roulotte" (en hommage à Jean Vilar) dans laquelle il assure le rôle de metteur en scène montant Beckett, Goldoni mais aussi ses premiers textes.
En 1979, sa pièce "Carthage", encore est diffusée par France Culture dans le nouveau répertoire dramatique dirigé par Lucien Attoun qui régulièrement enregistrera ses textes. En 1980, il obtient sa
maîtrise de philosophie en rédigeant Théâtre et Pouvoir en Occident. Suite à sa rencontre avec Jacques Fornier, le Théâtre de la Roulotte devient en 1981 une compagnie professionnelle où Jean- Luc Lagarce réalisera 20 mises en scène en alternant créations d’auteurs classiques, adaptations de textes non théâtraux et mises en scène de ses propres textes.
En 1982, "Voyage de Madame Knipper vers la Prusse Orientale" est mis en scène par Jean-Claude Fall au Petit Odéon programmé par la Comédie-Française (son premier texte à être monté par un autre metteur en scène en dehors de sa compagnie et à être publié sous forme de tapuscrit par Théâtre Ouvert). Jean-Luc Lagarce verra seulement quatre de ses textes montés par d’autres metteurs en scène et après 1990, aucun ne le sera, mais il ne se sentira pas un auteur "malheureux", il est un auteur reconnu et ses pièces sont accessibles, lues, voire mises en espace ou publiées.
C’est en 1988 qu’il apprend sa séropositivité, mais les thèmes de la maladie et de la disparition sont déjà présents dans son oeuvre notamment dans "Vagues Souvenirs de l’année de la peste" (1983) et il
refusera toujours l’étiquette "d’auteur du SIDA" affirmant à l’instar de Patrice Chéreau que ce n’est pas un sujet.
En 1990, il réside six mois à Berlin grâce à une bourse d’écriture (Villa Médicis hors les murs, Prix Léonard de Vinci), c’est là qu’il écrit Juste la fin du monde, le premier de ses textes à être refusé par
tous les comités de lecture. Il arrête d’écrire pendant deux ans se consacrant à la mise en scène, écrivant des adaptations et répondant à des commandes (cf. "Comment j’écris" in "Du luxe et de
l’impuissance"). Essentielle dans son oeuvre, il reprendra intégralement cette pièce dans son dernier texte "Le Pays lointain".
Il décède en septembre 1995 au cours des répétitions de "Lulu".
Si son oeuvre littéraire est essentiellement composée de 25 pièces de théâtre, il a aussi écrit 3 récits ("L’Apprentissage", "Le Bain", "Le Voyage à La Haye"), 1 livret d’opéra ("Quichotte"), 1 scénario pour le
cinéma ("Retour à l’automne"), quelques articles et éditoriaux (publiés sous le titre générique "Du luxe et de l’impuissance") et a tenu durant toute sa vie de théâtre un journal composé de 23 cahiers.
Depuis son décès, de nombreuses mises en scène de ses textes ont été réalisées et certaines ont connu un large succès public et critique. En France, il est actuellement l’auteur contemporain le plus
joué.
Il est traduit dans de nombreux pays et certaines pièces comme "J’étais dans ma maison et j’attendais que la pluie vienne" ou "Les Règles du savoir-vivre dans la société moderne" le sont dans une vingtaine
de langues.
+ d’informations sur : www.lagarce.net
J-L Lagarce en parle
Il est neuf heures‚ c’est dans la banlieue de Londres que cela se passe. Des gens attendent d’autres gens. Ils ont mangé de la soupe‚ du poisson‚ des pommes de terre au lard et de la salade anglaise‚ ce qui‚ on en convient‚ est assez logique dans la banlieue de Londres.
On se retrouve.
On fait connaissance‚ on se raconte des histoires‚ on passe une excellente soirée. On parle. On dit des bêtises – le scrabble‚ voilà un jeu intelligent ! – on s’essaie aux charades‚ on saute des coqs aux ânes et des vices à Versailles. Un pompier allume une bonne‚ il faudrait toujours
se méfier du feu qui couve sous l’eau qui dort.
On se perd un peu.
On passe une assez bonne soirée. On ne devrait pas tant boire peut-être‚ ce n’est pas exactement le jour idéal pour commencer à fumer. On danse. Lorsqu’on aura trop mal à la tête‚ on se couchera par terre pour se reposer. Si on est trop joyeux‚ on montera sur la table.
On passe une pas trop mauvaise soirée.
On fait du bruit avec la bouche.
On passe une soirée comme toutes les autres soirées‚ on crie‚ on geint‚ on gémit et on chante. Jamais on ne se tait‚ le silence‚ ce n’est plus possible. Lorsqu’on a trop peur‚ on triche un peu. Lorsqu’on est prêt à se dévorer‚ on se quitte.
Chacun joue son rôle.
On pourra se revoir une autre soirée‚ nous recommencerons quand on veut‚ chaque fois qu’il le faut. Rien ne nous concerne. Jamais. Ce que nous disons‚ c’est juste pour parler.
Jean-Luc Lagarce
Distribution
création en 1991
texte : Eugène Ionesco
mise en scène : Jean-Luc Lagarce
avec : Mireille Herbstmeyer, Jean-Louis Grinfeld, Elizabeth Mazev ou Marie-Paule Sirvent, Emmanuelle Brunschwig, Olivier Achard, Christophe Garcia.
costumes : Patricia Dubois
décor : Laurent Peduzzi
restauration et peinture : Atelier du Nouveau Théâtre / CDN de Besançon et de Franche-Comté
sous la direction de : Karl Auer & Patrick Bru
création et régie son : Christophe Farion, Michel "Jason" Richard
création et régie lumière : Didier Etievant, Bernard Guyollot
régie générale & plateau : Romuald Boissenin
regard extérieur : François Berreur
Mentions
production Cie Les Intempestifs
avec le soutien du Nouveau Théâtre / C.D.N. de Besançon et de Franche-Comté et du T.N.B. (Théâtre National de Bretagne) Rennes
production de la création : Théâtre de la Roulotte – C.D.N. de Franche-Comté.
avec le soutien du Centre d’Art et de Plaisanterie de Montbéliard